A l’issue d’un travail initié dans notre collectif, enrichi d’échange avec le collectif campus-d’après Grenoble, un courrier à été envoyé en Octobre 2021 au Comité National de la Recherche Scientifique (CoNRS).
Ce courrier a été co-signée par plus d’une vingtaine de collectifs, commissions ou groupe œuvrant à la réduction de l’empreinte carbone dans les laboratoires rattachés au CNRS.
Ce courrier fait remonter auprès de cette instance (qui joue un rôle clé dans l’évaluation des chercheurs) la perception très répandue que les « critères d’évaluation de sections du Comité National comme fortement incitatifs à une mobilité à l’étranger« , ce qui pousse à une hypermobilité en contradiction avec les objectifs de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre.
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Destinataires :
- Au président de la Conférence des Présidents du CoNRS
- À la coordinatrice élue des secrétaires des sections du CoNRS
- Aux présidents de toutes les sections du CoNRS
Signataires:
Texte du courrier
Le 13 octobre 2021
A l’attention des sections du Comité National de la Recherche Scientifique,
Le changement climatique est une préoccupation majeure de nos concitoyens mais aussi des acteurs du monde de la recherche. Les enquêtes récentes de Labos 1point5 et de RogueESR montrent que plus de 80% de nos collègues[1] aspirent à des changements profonds dans la pratique de nos métiers afin de réduire nos émissions de gaz à effet de serre.
Depuis l’an passé, la Direction du CNRS invite[2] d’ailleurs ses laboratoires à établir leur bilan de gaz à effet de serre et à « trouv[er] les solutions permettant de soutenir une recherche d’excellence, tout en intégrant l’urgence des situations, tant environnementales que sociétales.«
Les bilans établis dans les laboratoires montrent qu’une part importante -parfois majoritaire- des émissions est due aux seuls déplacements en avion des chercheurs. Réduire durablement nos émissions nécessite donc une réduction significative du nombre de vols, en particulier ceux à longue distance qui impactent particulièrement ces bilans.
Les collectifs, commissions ou directions cosignataires de ce courrier œuvrent à l’échelle des laboratoires pour sensibiliser à ces enjeux, mais se heurtent fréquemment à une objection dont nous souhaitions vous faire part.
Des chercheurs CNRS ressentent des critères d’évaluation de sections du Comité National comme fortement incitatifs à une mobilité à l’étranger. Avancement ou Climat, pourquoi faudrait-il choisir ?
Nous apprécions l’importance du critère de « rayonnement international » dans l’évaluation d’un chercheur. Malheureusement, l’unité de mesure de ce rayonnement est souvent perçue comme étant la visibilité individuelle, la surface d’exposition lors d’évènements internationaux, voire le nombre de « séjours courts [..] à l’étranger » ou de « participation[s] aux jurys de thèse ou d’habilitation […] à l’étranger » [3].
Ainsi, pour nos collègues aspirant à une promotion, accepter systématiquement toute invitation lointaine est perçu comme une stratégie payante. A contrario, adopter une mobilité internationale sobre en carbone apparait comme un choix de carrière plus hasardeux.
Nous espérons que vous serez sensibles à cette remontée du terrain, et que les nouveaux critères d’évaluation et les nouvelles « recommandations aux candidats » ne donneront pas l’impression de valoriser systématiquement toute forme de mobilité internationale indépendamment de son coût climatique.
Avec l’expression de notre confiance et de nos respectueuses salutations,
[1] 88% d’après l’enquête de labos1point5 et 84% d’après l’enquête de RogueESR (ces deux collectifs nationaux ne sont pas liés à la présente initiative).
[2] https://www.cnrs.fr/fr/recherche-et-developpement-durable-le-cnrs-poursuit-son-engagement
[3] les exemples en italique sont donnés à titre illustratif. Il ont été arbitrairement relevés dans les critères actuellement en ligne parmi la première dizaine de sections du Comité National, cf a b c d .